Mon absence a été honteusement longue sur
La Bouteille à la
Mer (près de deux mois,
n’arrangeant pas la santé de mon rendez-vous
Un mois, un extrait qui
a pris sacrément du retard
...)
ce qui ne m'a pas empêchée de faire de belles découvertes
(principalement en séries TV) pour respirer un peu face à la masse
de boulot. En bref, je suis tombée définitivement sous le charme de
Once Upon a Time (et,
accessoirement du Captain Hook et encore plus dans le final de la
saison 2), je me suis extasiée devant la beauté des costumes de
Paradise (2012), l'adaptation
très librement inspirée de
Au Bonheur des Dames
de Zola et j'ai frissonné devant le suspens de
Paradox
(2009), une excellente série
britannique (pléonasme?) qui, allez savoir pourquoi, n'a pas été
renouvelée pour une deuxième saison ! (dé-gou-tée ? Rien qu'un peu.) Je
compte vous parler des deux dernières séries très vite puisque je
suis déjà en vacances.
Un billet est aussi en préparation sur le premier roman de Virginia
Woolf,
La traversée des
apparences (
The
Voyage Out), pour ma seconde participation au challenge qui lui est consacrée chez
Lou et je dois dire que ça a été un
véritable coup de cœur. Le problème, c'est que je l'ai fini il y a
près d'un mois et qu'il va falloir que je m'y replonge un petit peu
ce qui n'est pas pour me déplaire.
Place maintenant à
Parade's End
où j'ai pu retrouver avec plaisir le brio, la sensibilité et la
sensualité du travail de la réalisatrice de la meilleure adaptation (selon moi) de
Jane Eyre, Susanna White, mais surtout, pour être honnête, la voix profonde de basse de Benedict Cumberbatch qui m'avait manquée depuis
Sherlock.
J'ai
pu d'autant plus en profiter que j'ai eu la chance de voir cette
mini-série en VO avant qu'elle soit diffusée en France, ce qui sera
justement le cas sur Arte les 7 et 14 juin prochains (en VOSTFR et
non en VF, je l'espère). D'ailleurs, rien que la voix si
particulière et le charisme de Benedict Cumberbatch rendent
l'immersion dans la gentry anglaise presque naturelle, preuve que ce
rôle lui va comme un gant.
Le personnage de Christopher est très difficile à cerner et pourtant, il n'est pas du tout antipathique. On sent pourquoi il peut déstabiliser tous ceux qui l'entourent, et au premier chef sa propre femme qui ne supporte plus de vivre avec un homme si froid, si lisse et si imperturbable. Déjà en Sherlock, Benedict Cumberbatch avait réussi grâce à un jeu subtil à transmettre des émotions très variées derrière le mur de froideur que son personnage avait posé entre lui et ses congénères. Christopher n'est pas à proprement parlé un sociopathe mais seulement un personnage littéralement perdu dans un monde qu'il ne reconnaît pas comme le sien. Il doit faire face au décalage entre son système de valeurs et les changements autant idéologiques que personnels de son temps, sans parler de la guerre qui va briser littéralement encore plus son univers.
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Sylvia Satterthwaite (Rebecca Hall) |
Tout ce qu'il vit, tous ceux qu'il rencontre sont déformés par ce décalage et tiraillé comme il est entre deux femmes et entre deux vies possibles, le leitmotiv du prisme et du miroir de poche cassé de Sylvia qu'elle conserve précieusement rendent bien à l'image ce thème récurrent du tiraillement et d'un monde complètement incohérent, comme éclaté, fracturé aux yeux de Christopher.
Étrangement, même snob, Christopher dissimule une grande sensibilité et les passages avec
son fils sont très touchants, lui qui le traite comme son propre
fils malgré les doutes sur sa paternité. Tout ce sentimentalisme
est tourné autour de deux personnages : le cèdre centenaire à
Groby Hall dans le Yorkshire où il a passé son enfance et Valentine
Wannop, la suffragette, excellemment interprétée par Adelaide
Clemens. Comparer une jolie fille à un arbre peut paraître étrange
et pourtant, il 'agit encore d'un autre tiraillement entre la
nostalgie de son passé et le désir qu'il a pour cette jeune fille
intelligente et passionnée, tournée vers l'avenir. On pourrait
croire que le motif du triangle amoureux est tellement éculé que la
série ne peut produire à partir de ça rien de très original.
Pourtant, la relation entre Christopher et Valentine peine à sortir
du flirt platonique pour mieux nous faire entrer dans le monde des
fantasmes, des occasions manquées et des allusions voilées.
Le
personnage de Sylvia, interprétée par Rebecca Hall, n'est pas un
rôle facile et elle est peut-être celle qui stagne le plus, qui
reste pareille à elle-même, étrangement cohérente, parmi des
personnages comme Christopher ou Valentine qui évoluent beaucoup. Ça
ne veut pas dire que son personnage n'a pas la même profondeur et
les mêmes nuances de caractère que les autres mais, sans être une
garce, j'ai eu beaucoup de mal à m'identifier à elle et à plaindre
sa souffrance dans ce mariage malheureux. Pur spécimen de la femme
mondaine et changeante, elle passe facilement de la colère, voire du
cynisme, à la séduction sans jamais se remettre en question. Même
quand elle essaye de se rendre digne de son mari, elle ne peut pas
s'empêcher de retourner à ses vieux amours et à ses vieux démons :
l'hystérie, le mensonge et finalement la manipulation.
La
place de la guerre dans cette série est plutôt originale :
elle n'est pas reléguée au profit de l'intrigue sentimentale. Elle
en est au contraire un des ressorts car de la survie de Christopher
dépend le dénouement heureux ou malheureux de ce triangle amoureux.
Grâce à l'intervention de son frère Mark (Rupert Everett),
Christopher est assez bien protégé de l'enfer des tranchées avant
d'y être envoyé à cause d'une faute disciplinaire contre le
général en personne. A coté du réalisme de la vie dans les
tranchées, on est confronté aussi à son traumatisme au travers
d'un personnage secondaire qui m'a beaucoup marqué qu'on voit
pourtant très peu. Il s'agit du colonel Bill Williams, le
commandant de bataillon dans les
tranchées à la limite de la démence que Christopher sert comme second. Il y a une scène
fabuleuse où le colonel traverse tranquillement le no
man's land pour lancer une
grenade directement dans la tranchée adverse au risque de se faire
canarder. La performance de Steven Robertson est juste exceptionnelle
à la hauteur de son rôle de Michael Connolly, un jeune homme
souffrant d'un handicap moteur et cérébral dans Inside
I'm dancing avec James McAvoy.
En
définitive, Parade's End
est encore une réussite pour la BBC et HBO en traitant avec
intelligence à la fois des bouleversements de la société
edwardienne, de la guerre et des aspirations individuelles. Le
casting est parfait, surtout mené par le charisme de Benedict
Cumberbatch au talent plus que confirmé et de belles découvertes
comme Adelaide Clemens que j'ai pu brièvement retrouver hier en
salle dans The Great Gatsby
de Baz Luhrmann. J'ai d'ailleurs hâte de vous parler de cette
adaptation du roman de F.S Fitzgerald. Je ne sais pas si j'aurais
l'occasion de lire le roman original de Ford Madox Ford dont Parade's
End est l'adaptation mais j'ai
bien envie de découvrir cet auteur très vite par un autre roman. Si
vous avez déjà lu Ford Madox Ford et que vous avez des suggestions,
je suis preneuse !
En
attendant la diffusion de Parade's End les
7 et 14 juin 2013 à 20h50 sur Arte, voici en extrait mon passage
préféré, tout en poésie et en sensualité. On a tout de suite
étrangement envie de se perdre dans le brouillard anglais...
J'étais tristoune hier en découvrant la date assez ancienne de ton dernier billet car les commentaires que tu avais laissés chez moi me donnaient très envie de poursuivre l'échange (ce qui n'aurait pas été impossible par d'autres moyens, bien sûr !).
Mais je suis si heureuse de découvrir ce beau billet qui, non seulement, m'annonce une série que je ne compte pas manquer (je suis très séduite par tout ce que tu en dis), mais révèle aussi pas mal de points communs à nos deux univers, ce qui laisse présager d'autres belles découvertes :)
Je partage, par exemple, ton engouement pour "Once Upon a Time", que j'ai commencé à suivre sur les conseils de ma petite soeur, sans grande conviction, mais j'ai vite été emballée par ce monde foisonnant, envoûtant, et je me suis attachée à certains personnages. J'attends, pour ma part, de visionner la saison 2.
"The Paradise" me tente diablement ! "Le Bonheur des Dames" est un de mes romans favoris, je l'ai lu maintes fois, et cette série a l'air de toute beauté.
J'aimerais me procurer le coffret DVD... Hum !
Enfin, la série "Sherlock"... Hum, hum ! J'ai le coffret des saisons 1 et 2 mais j'ai seulement eu l'occasion de visionner le premier épisode : aussitôt charmée par le ton et l'ambiance !
Je m'arrête là car j'ai dû écrire un roman ; je laisse donc l'aspect littéraire de côté mais je sais que nous aurons d'autres occasions d'y venir ;)
Tu constateras sans doute que je compte bien revenir par ici très souvent et te recevrais chez moi avec le plus grand des plaisirs chaque fois que tu y passeras.